Il est vrai que Paris est la seule agglomération de France à ne pas avoir de communauté urbaine avec les communes limitrophes. Celles-ci, souvent pauvres ou moins riches, verraient d’un grand intérêt la possibilité de lier leur destin à celui de la métropole. Lasses de la coexistence entre villes riches et villes pauvres, les banlieues proches de Paris opteraient certainement pour la solidarité et la coopération entre voisins, incluant notamment et forcément Paris.
Les inégalités, aussi bien urbaines que sociales (logements, chômage) entre Paris et ses banlieues sont si visibles que le grand Paris devient pour certains élus une nécessité ou une évidence.
Etant donné que la péréquation (la péréquation est un mécanisme de redistribution qui vise à réduire les écarts de richesse, et donc les inégalités, entre les différentes collectivités territoriales), objectif de valeur constitutionnelle depuis 2003, semble insuffisante à la réalisation de certains projets indispensables aux collectivités territoriales faiblement dotées, le grand Paris devient un réflexe pavlovien, sensé nous libérer des difficultés épisodiques et passagères du RER A ou d’autres problèmes d’aménagement urbain.
Est-ce nécessaire de créer, comme le préconise Nicolas Sarkozy, un nouveau cadre institutionnel ou un nouveau mode de gouvernance pour résoudre les difficultés liées au territoire ?
D’une part, l’idée qui peut, de prime abord, paraître intéressante, se révèle, in fine inopportune car elle a l’allure inélégante d’une tactique électorale destinée à fragiliser le président de la région Ile-de-France, Jean-Paul Huchon. La volonté du Président de la république de faire voter une loi entérinant la création du grand Paris en 2010, année des élections régionales, est malhabile et bassement politicienne.
D’autre part, cette idée laisse infuser le risque d’une réorganisation territoriale au détriment de la région ! Ce qui relèverait d’une absurdité monumentale, au regard de la décentralisation. La région Ile-de-France, de par ses compétences en matière économique et d’attractivité du territoire, reste un acteur clé, indispensable et pourvu de moyens capables de soutenir techniquement et financièrement de nombreux projets sociaux et urbains portés par les communes de la région.
En plus du non-sens politique qui consiste à placer une région sous la presque tutelle d’un ministre, il semble mal aisé de croire, un tant soit peu, qu’il suffit de mettre sur pied un artifice institutionnel, pompeusement baptisé « Grand Paris » pour que disparaissent les problèmes des franciliens !
S’il est vrai que les réalisations de la région Ile-de-France ne sont pas souvent perceptibles par le francilien lambda, mais force est de reconnaître que la région Ile-de-France investit dans des projets déterminants notamment le plateau de Saclay (future sillicon Valley). C’est quand même la région qui finance l'essentiel des outils de recherche, le Synchrotron, les nanotechnologies, Neurospin, la rénovation de l'université d'Orsay. Moi qui travaille sur les pôles de compétitivité, je sais qu’il s’agit d’interventions pertinentes réalisées par la région. Globalement, la région Ile-de-France, reste un partenaire financier important et incontournable des pôles de compétitivité.
La région Ile-de-France est toujours associée à chaque projet sérieux, ambitieux et utile aux franciliens. Elle est souvent à l’origine des initiatives. Le prolongement de la ligne 13 du métro (ligne la plus surchargée) fait un grand bien aux habitants d’Asnières ! Le projet de la prolongation de la ligne 7 jusqu'au Bourget est fort intéressant surtout pour ceux qui l’utilisent fréquemment ! Sans oublier le projet Arc Express (la rocade de banlieue ou métrophérique) dont le coût avoisine les 7 ou 10 milliards d'euros, pour le confort des futurs déplacements de banlieues à banlieues, etc.…
La région Ile-de-France a peut-être tort de ne pas tomber dans l’obsession communicationnelle (en vogue par saison sarkozienne) en vociférant sur toutes les ondes hertziennes tout ce qu’elle réalise, mais le bon sens et le courage politique nous obligent à reconnaître ce qui est à César et ce qui est à Dieu…
Tout n’est pas rose non plus, sinon ce serait trop beau pour Jean-Paul Huchon et son acolyte Jean-Paul Planchou. La rénovation et l’amélioration du système de transports en Ile-de-France souffrent d’un déficit chronique de 28 milliards d’euros. L’Etat étant souvent aux abonnés absents, il reviendrait à la région d’abattre un travail titanesque afin que le système des transports évolue plus rapidement dans un sens profitable à tous les franciliens.
Enfin, pour asseoir l’idée d’une nécessité du Grand Paris, on reproche facilement à la région son faiblesse en matière de politique de logement.
C’est quand même la Région Ile-de-France qui émet les grandes orientations et fixe des objectifs ambitieux à chaque département, lequel se défausse sur les communes. Le hic, c’est que la région, malgré sa bonne volonté, ne délivre pas les permis de construire. Ce sont les communes. Ces dernières refusent souvent la construction de logements sociaux en raison de la pression de certains riverains.
Ce n’est surement pas la faute de la région si certains élus, au mépris de la loi SRU, font passer leur réélection avant l’intérêt général. En même temps, il ne serait pas vain d’affirmer que la région n’est nullement inactive en matière de politique de logement. Elle a un établissement foncier doté de la capacité de préempter des terrains qui est à encourager et à dynamiser car celui-ci n’a pas encore atteint sa force de croisière. Et l’idée de la région de créer un syndicat du logement à l’échelle régionale avec de vraies prérogatives d’incitation, à l’image du STIF est fortement recommandable.
Il est grand temps que la région s’exporte dans les banlieues et explique assidument aux franciliens ce qu’elle a toujours fait, ce qu’elle ambitionne de faire et, non se recroqueviller sur ses acquis institutionnels, afin de montrer que le Grand Paris n’est rien d’autre qu’un mythe porté par des vents fougueux et forcément sarkoziens.