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14 janvier 2015 3 14 /01 /janvier /2015 13:22

La France a vécu sans doute l’un de ses plus puissants traumatismes depuis la seconde guerre mondiale. A travers l’assassinat de toute une rédaction de presse, c’est une de nos valeurs les plus chèrement acquises qu’on a voulu abattre : la liberté d’expression.

 

A cet acte horrible, les Français n’ont pas répondu par la peur, l’abattement et la colère passive. Ils ont au contraire répondu par une immense clameur patriotique et une volonté de vivre ensemble. Nous avons été des millions à la marche historique du 11 janvier. Les manifestions de soutien à Charlie Hebdo, aux policiers et aux juifs lâchement assassinés se sont multipliés spontanément à travers toutes les villes dans une perspective certaine de lutte contre l’obscurantisme religieux.

 

L’intégrisme musulman est un vide intellectuel. Partout où il se déploie, il s’en prend à la connaissance, interdisant ainsi chaque année à des dizaines de millions de petites filles d’aller à l’école, enrôlant les garçons dans des madrasas. C’est d’ailleurs ainsi que l’on reconnaît les barbares, qu’ils s’appellent boko haram, talibans ou Daesh : ils ne supportent pas ceux qui tiennent un stylo et qui s’en servent. Les mots, la liberté d’expression, le plaisir jubilatoire de se moquer, cette liberté, aussi, de dire n’importe quoi juste parce que cela nous plaît, ils la vomissent, peut-être même sont-ils incapables de la comprendre. Ils jettent leur voile noir sur le savoir, le progrès, et la satire . Ils veulent nous enfermer avec eux dans leur néant. Ils échoueront, mais après combien de peine, de douleur, de pertes irréparables !

 

Ne nous leurrons pas. Contre le terrorisme, l'émotion, la compassion, l'indignation ne sauraient suffire. Pour gagner, contre les soldats du califat, cette guerre que l'on se décide enfin à nommer, il faudra surtout du courage, de la force et de la détermination. Ce sera long, difficile et douloureux. Rien ne serait pire que de voir les Français et leurs dirigeants, cédant au vertige de la contemplation de soi, aux délices du narcissisme médiatique, s'enivrer au spectacle de la mobilisation de dimanche pour retomber après, comme après l'affaire Merah, dans ce déni et cet aveuglement auxquels nous avons longtemps, trop longtemps, sacrifié.

 

Car l'évidence est là. Si dérangeante soit-elle, il n'est plus possible de la nier. Les dix-sept victimes innocentes de ces trois jours tragiques ne sont pas tombées sous les balles d'une abstraction, d'une horreur vague, d'une barbarie indéfinie. Ils ont été lâchement assassinés par des terroristes français, qui sont nés chez nous, qui ont grandi chez nous, qui sont allés à l'école chez nous et dont le parcours criminel multirécidiviste, fanatisation carcérale, embrigadement à l'étranger) correspond point par point à celui décrit par les experts et les services de sécurité.

 

Bien sûr, l'immense majorité des musulmans français ne souhaitent qu'une chose: pratiquer pacifiquement et tranquillement leur religion, dans le respect des lois de la République. Bien sûr, il est capital de ne pas couvrir d'un injuste opprobre ceux qui ne le méritent en rien et qui ont témoigné dimanche par leur présence en masse qu'ils n'avaient rien de commun avec les fanatiques.

 

Oui, l'intégrisme musulman existe. Oui, il existe en France, comme dans le reste du monde, des groupes violents qui haïssent indistinctement les juifs et les chrétiens, mais aussi les musulmans qui ne partagent pas leur idéologie barbare. Oui, il y a dans nos banlieues et dans nos prisons, des discours prêchant la haine de la France et de l'Occident. Oui, il existe chez nous des caches d'armes, des sergents recruteurs pour les camps d'entraînement du Yémen ou de Syrie. Oui, cet intégrisme religieux et radical s'enracine bien dans une réalité sociale: celle d'une doctrine politique, radicale, intolérante, indifférente à la légalité, dont il importe de circonscrire au plus vite les revendications si l'on ne veut pas qu'il fasse chaque jour davantage d'émules.

 

Enfin le terrible malentendu serait de croire qu'il suffit d'une bonne police et de bons services de renseignement pour résoudre un conflit qui prend ses racines dans l'échec social, l'injustice et la discrimination, mais aussi dans la crise de l'intégration et la rupture de transmission. Comment accueillir «l'Autre» et lui transmettre ou lui faire partager ce que nous avons hérité de la République ? Si nous n'avons pas la fierté de nos valeurs, de notre culture? La France, celle qui a défilé dimanche, c'est une histoire ( républicaine), une vision civilisée du monde (égalité homme-femme, tolérance, liberté d'esprit et d'expression), un art de vivre ( dialogue plutôt qu'affrontement). Le plus grand défi maintenant est de transmettre ces valeurs aux jeunes de notre pays, quelle que soit leur origine. Leur faire entendre qu'ils ne sont pas obligés d'«être Charlie» mais qu'ils peuvent être fiers des valeurs de notre République, une et laïque.

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commentaires

L
Je suis tout à fait d'accord avec ce qui a été écrit dans l'article sauf que j'ai deux questions comment se fait-il que Merah ait été indicateur des services français ça a été révélé sur BFM àl'époque du drame, comment se fait ilqu'on ait pu laisser filer dans la nature des individus repérés tels que les frères Kouachi, on ne se sent plus en sécurité et ça réveille de nombreux cauchemars pour bon nombre d'entre nous qui avons fui la terrorisme intégriste. C'est une nébuleuse seul le patriotisme peut vaincre, l'origine de la faille doit être trouvée et les responsables sanctionnés
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  • : Le blog de Hervé-Mélaine AGBESSI
  • : "L'esprit né de la vérité a plus de puissance que la force des circonstances" Albert SCHWEITZER.
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  • Hervé-Mélaine AGBESSI
  • Docteur en droit public économique, diplômé de l'université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne). Expert en fiscalité internationale.
  • Docteur en droit public économique, diplômé de l'université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne). Expert en fiscalité internationale.

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