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3 février 2013 7 03 /02 /février /2013 15:54

Les Etats-Unis et l’Europe sont  guettés par le déclin. Mais chez les premiers, il y a un président au verbe et intonation mobilisateurs. Chez la seconde, les dirigeants ne parviennent pas à raviver la flamme européenne,  illuminer le continent des rêves des pères fondateurs.

  L 'Europe n'est pas assez fière d'elle-même », avait dit François Hollande à Berlin lors de la célébration du cinquantième anniversaire du Traité franco-allemand de l'Elysée. Que François Hollande ne s'écoute-t-il lui-même ! Que lui, et Angela Merkel et les autres dirigeants européens, ne délivrent-ils enfin un grand discours qui explique ou réaffirme aux peuples le rôle de l'Europe au 21e  siècle, l'intérêt qu'elle a d’aller loin dans l’Union, la place du « Vieux Continent » dans le monde instable et multipolaire, la force de ses valeurs de démocratie quand beaucoup sont séduits par l'asiatisme. En clair, le discours qui redonne la foi dans l'Union manque cruellement.


En temps de crise, le taux de croissance d'un pays n'est pas déconnecté du lyrisme de ses dirigeants. Au-delà des décisions ponctuelles et des politiques concrètes, c'est le souffle qui porte la confiance. Et les deux sont liés comme ce qui se pense clairement s'énonce clairement : si les dirigeants européens pataugent depuis quatre années sans parvenir à surmonter la crise, c'est d'abord parce qu'ils n'ont plus une idée simple, forte et partagée de ce qu'est l'Europe.


Deux événements parallèles  illustrent tristement ce propos. Cet anniversaire à Berlin de l'amitié franco-allemande et l'inauguration à Washington du deuxième mandat de Barack Obama. Les deux régions occidentales vivent le même tempo historique : la crise économique les frappe ensemble, un même sentiment décliniste les mine, nourrit par la montée inéluctable de la Chine et des autres puissances démographiques du sud, une semblable déchirure interne, nord/sud en Europe et côtes/centre aux Etats-Unis, casse les solidarités d'hier, enfin la montée des technologies d'autonomie poussent l'individualisme et remet en cause certains des principes de la civilisation occidentale.

 

Etats-Unis et Europe sont très profondément, très fondamentalement, affectés par le même mal. Si l'on en juge par la philosophie politique, le consensus idéologique entre droite et gauche, républicains et démocrates, les Etats-Unis sont plus gravement divisés. Si l'on en juge par l'économie, le taux de croissance, c'est l'Europe qui souffre le plus, elle est en récession quand l'Amérique peut se féliciter d'un 2,5% de hausse du PIB cette année.

 

Les discours prononcés à Berlin lors cet anniversaire du Traité franco-allemand étaient lourds, à l'image de la politique économique européenne anti-crise. Catalogue de choses à faire, promesses de dialoguer encore et encore, engagement de rester soudées. Le président de la République fédérale, Joachim Gauck, l'a résumé à l'adresse de François Hollande : « il est une certitude que vous pouvez emporter avec vous à Paris : oui, les Allemands veulent l'Europe ! Et ils la veulent toujours et uniquement sur le fondement de l'amitié profonde entre la France et l'Allemagne ». Très bien!danke! Mais quelle Europe ? Nous resterons ensembles, oui, mais pour faire quoi ? Quelle identité donnons-nous à cet ensemble ? Quelle boussole pour cet ensemble ?


Réécouter le discours inaugural du président Obama donne la réponse : le président réélu fait de la haute politique. « Serment », « dévouement », « credo fondateur », et un « nous le peuple » en scansion : forgés dans l'histoire longue, les mots osent et frappent. Ils pourraient être ridicules par leur simplicité, mais ils élèvent. C'est que le message en dit long : « Les patriotes de 1776 n'ont pas combattu pour remplacer la tyrannie d'un roi par les privilèges de très peu ». « Nous le peuple, on comprend que le pays ne peut réussir quand une minorité de plus en plus réduite va bien tandis qu'une majorité de plus en plus large a du mal. La prospérité américaine repose sur les épaules larges d'une classe moyenne ». Barack Obama avait trouvé les mots parce qu'il tranche net dans le débat politique : il engage un combat contre les inégalités et ce combat passe par une réhabilitation de l'Etat. Il sonne le glas de l'ère Reagan pour qui « l'Etat est le problème ». Même si dans les faits, les difficultés ne manqueraient pas, force est de constater qu’une ligne claire est tracée.


L'Europe doit, à son tour, trancher nettement son débat politique interne, entre solidarité et souveraineté. La première, c'est-à-dire les instruments de convergence des pays et de croissance de l'ensemble, ne viendra qu’une fois gommé ou corrigé « le déficit démocratique » reproché à l’Europe. C’est uniquement à cette condition que l’abandon de la souveraineté serait intégralement accepté de tous. Il n'y a pas d'autre choix. La crise s'est prolongée faute de trancher. Et, cette décision une fois assumée, les mots viendront, comme ceux qu'ose Barack Obama, pour dire « nous les peuples d'Europe» voulons être ensembles pour défendre, fièrement, aux yeux de la communauté internationale ce que nous serions devenus : un modèle inébranlable  de dialogue et d'humanisme.

   

Le chemin semble encore loin, à l’heure où 52 % des Français sont favorables à la sortie du Royaume-Uni de l'Europe. Hélas ! 

 

 

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  • : Le blog de Hervé-Mélaine AGBESSI
  • : "L'esprit né de la vérité a plus de puissance que la force des circonstances" Albert SCHWEITZER.
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  • Hervé-Mélaine AGBESSI
  • Docteur en droit public économique, diplômé de l'université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne). Expert en fiscalité internationale.
  • Docteur en droit public économique, diplômé de l'université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne). Expert en fiscalité internationale.

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