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13 janvier 2013 7 13 /01 /janvier /2013 16:20

Le débat actuel sur  l’ouverture du mariage aux homosexuels, devenu le «mariage pour tous», est un débat que François Hollande jugeait «légitime». Sauf que cet automne, le débat a dégénéré, précisément avec ces amalgames entre l'homosexualité et la déviance, entre l'homosexualité et la polygamie et l'inceste.


A l’issue de la primaire socialiste, lorsque François Hollande assurait qu’il allait ouvrir le mariage aux homosexuels, les sondages semblaient indiquer une évolution notable dans la société. Par exemple, un sondage BVA daté de janvier 2012 indiquait que plus de 63 % des Français souhaitaient que le mariage entre personnes de même sexe devienne un droit. Un an plus tard, la majorité des Français reste majoritairement favorable au mariage, mais cette majorité se désagrège.


Cette question de la reconnaissance de l’homosexualité comme une sexualité égale à l’hétérosexualité touche les gens dans leur vision du monde et dans leur intimité. Il faut se souvenir des débats sur l’IVG. En septembre 1974, à l’époque du vote de la loi, 65% des personnes interrogées lors d'un sondage se déclarent favorables à une législation. Pourtant au Parlement, les sessions soulèvent une violence inouïe: on parle de «meurtre», de «dégénérescence», de «permis légal de tuer», de «génocide légal comparable au pire racisme nazi».


Bref. L'idée que la République ne reconnaît que le mariage hétérosexuel est un des arguments forts des opposants à l'actuel projet de loi. Cette thèse a été développée par le professeur Pierre Delvolvé qui estime que le mariage, dans sa conception traditionnelle, appartient au bloc des «principes fondamentaux reconnus par les lois de la République» et a donc valeur constitutionnelle.  Ce raisonnement paraît intéressant, mais est en contradiction avec la lecture que fait le Conseil constitutionnel de notre Loi fondamentale.


Celui-ci a une conception plutôt libérale de ces principes fondamentaux qui ont consacré des libertés (comme la liberté d'association, en 1971) et ne devrait pas y recourir pour restreindre un droit, en l'occurrence celui du mariage. De plus, traditionnellement, les juges constitutionnels, ont toujours laissé  les mains du législateur largement libres sur les questions de société.

Autant qu’on s’en souvienne, les Sages ont déjà eu à se prononcer sur le mariage homosexuel en janvier 2011, dans la cadre d'une question prioritaire de constitutionnalité, et n'ont pas fait mention d'un tel «principe fondamental».  La décision de janvier 2011 a ensuite été confirmée par la Cour européenne des droits de l'homme, qui laisse une marge d'appréciation à chaque État pour les questions telles que le mariage, l'avortement, l'euthanasie, etc.


Il ne fait aucun doute que la loi sur le mariage pour tous est une grande réforme qui promeut le concept d’égalité, malgré la violence des débats qu’elle suscite. Cette loi, une fois adoptée et promulguée, ne serait pas seulement le signe d’une évolution des mentalités mais aussi son déclic. Celle sur le Pacs l’a montré. 87 % des français pensent que l’homosexualité est «une manière comme une autre de vivre sa sexualité» en novembre 2012. Ils étaient 54% en 1986.


Enfin, on peut regretter que l’activisme de certains parlementaires à vouloir adjoindre, par amendement, la procréation médicalement assistée (PMA) au mariage pour tous ait brouillé la lisibilité d’une si grande réforme sociétale. Cette précipitation à vouloir légiférer sur un sujet aussi grave a visiblement démultiplié les ardeurs des manifestants d’aujourd’hui qui n’hésitent d’ailleurs pas à surfer sur tout amalgame. Heureusement, cet amendement a été retiré. On peut espérer un débat à l’avenir puisqu’un article sur la PMA sera introduit par le gouvernement dans le projet de loi sur la famille qui sera présenté en mars prochain.

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  • Hervé-Mélaine AGBESSI
  • Docteur en droit public économique, diplômé de l'université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne). Expert en fiscalité internationale.
  • Docteur en droit public économique, diplômé de l'université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne). Expert en fiscalité internationale.

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