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14 janvier 2010 4 14 /01 /janvier /2010 17:42

Avec sa proposition de loi sur le vote des étrangers, le Parti socialiste fait ressortir une stratégie visant depuis trente ans à tenir la dragée haute à la droite à la veille d'échéances électorales majeures.

Cette manœuvre de Martine Aubry relève tant de la stratégie interne en vue des régionales de mars prochain que de la primaire pour la présidentielle.

La question du droit de vote des étrangers aux élections locales est devenue lancinante au début des années 1980, lorsque François Mitterrand en a fait un des thèmes de sa campagne pour la conquête de l'Elysée, afin  de susciter puis d'exploiter la montée du Front national et éparpiller les voix de la droite.

Le retour de ce thème à deux mois du premier tour des élections régionales semble faire écho à la stratégie d'alors. Pourquoi s’en priver me dira-t-on !!

Au pouvoir pendant la majorité des années 1980 et 1990, la gauche aurait pu à maintes reprises faire adopter cette mesure.

Le dernier gouvernement socialiste, animé par Lionel Jospin entre 1997 et 2002, l'avait envisagé mais son projet de loi n'a jamais été examiné par le Sénat et fut donc enterré de facto, cette réforme nécessitant en outre une modification de la Constitution avec une majorité de 60% au Congrès.

Nicolas Sarkozy s'est saisi de l'idée durant sa campagne présidentielle, dans le cadre d'accords bilatéraux avec le pays d'origine, mais sans l'inscrire au programme de son mandat.

L’immigration, la nationalité ou la citoyenneté étant, à l'initiative du chef de l'Etat, revenues en force dans le débat politique, le PS en  profite pour faire resurgir cette idée du droit de vote des étrangers.

Rappelons qu’ à l’instar de l'Italie ou l'Allemagne, la France exclut des scrutins locaux les étrangers non ressortissants de l'Union européenne, autorisés à voter au Benelux ou dans les pays scandinaves.

Cela concerne certes une grande partie de la population puisque, selon les chiffres de l'Insee, la France comptait en 2005 quelque 1,8 million d'étrangers non ressortissants de l'UE âgés de plus de 15 ans, soit 3,6% environ de la population âgée de plus de 15 ans.

Mais s'il l'a été dans les années 1970, avec une forte demande notamment d'Algériens ayant combattu pour la France, le droit de vote n'est plus une priorité pour les étrangers. En l’état actuel des choses, on peut le qualifier de gadget électoraliste déconnecté des vrais besoins des étrangers.

Que veut l’immigré ou l’étranger (que je qualifie de « Dreyfus des temps modernes ») ?

Il veut que le mot égalité retrouve son entièreté par une lutte effrénée contre les discriminations dont il est fréquemment victime. Il souhaite que les valeurs de la république soient aussi mises à son profit. Il veut participer activement aux efforts de ce pays sans être taxés maladroitement de parasite ou de profiteur. (Il y participe d’ailleurs déjà et depuis très longtemps malgré les contingences qui lui sont opposées). En clair, il veut que l’égalité en droit se transforme en égalité en fait dans sa vie de tous les jours.

 

Pour y parvenir, il ne suffit pas de lui assigner une fonction de bétail électoral pour les élections locales. Il ne suffit pas non plus de l’appâter avec la promesse d’en faire un citoyen local à part.   

La priorité en matière de droits des étrangers n'est pas dans le vote, mais dans les règles touchant à la nationalité, notamment la réforme de la naturalisation. Un étranger qui réunit certaines conditions doit avoir la possibilité d’accéder facilement à la citoyenneté française. Un toilettage des textes de loi régissant la nationalité s’impose  à tout égard.  C’est sur ce point que doit se focaliser le combat des socialistes s’ils veulent vraiment associer les étrangers (français en devenir) à la gestion des affaires de la cité.

 La proposition socialiste n’est  pas tant une idée en faveur des étrangers qu'un argument électoral du moment.

C'est certes une manière habile pour Martine Aubry de s'affirmer à gauche, dans son idée de l'alliance la plus à gauche. Mais cette stratégie n’est pas exempte de risques : Il n'y a pas eu de sondages récents et je ne suis pas sûr que les Français sont favorables à cette idée.

Martine Aubry use évidemment d’un discours fortement clivant et identitaire. Elle cherche à décomplexer le parti socialiste, à asseoir sa légitimité dans la primaire qui se prépare.

C’est naturellement un discours qui peut plaire à certains militants ; ceux-là même qui se mobiliseront durant la primaire. Mais derrière le discours, il faudra des actes forts !! Et c’est là que l’on risque d’entendre cet intarissable refrain : « les socialistes une fois au pouvoir font le contraire de ce qu’ils avaient promis ou… ne font rien de ce qu’ils ont promis » !! Plus jamais ça chers camarades…..

 

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commentaires

H
<br /> bravo.... pour une fois je ne trouve rien à redire à ton article...je ne changerai même pas une virgule.a+<br /> <br /> <br />
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  • : "L'esprit né de la vérité a plus de puissance que la force des circonstances" Albert SCHWEITZER.
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  • Hervé-Mélaine AGBESSI
  • Docteur en droit public économique, diplômé de l'université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne). Expert en fiscalité internationale.
  • Docteur en droit public économique, diplômé de l'université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne). Expert en fiscalité internationale.

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