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6 avril 2013 6 06 /04 /avril /2013 21:43

Tristesse, écœurement, dégoût, trahison, etc., tels sont les mots qui tournent en boucle de façon sempiternelle chaque fois qu’un élu socialiste provoque une onde de choc par sa malveillance. Mais quel type  de ressentiment pourrait consoler les socialistes de ce désastre politico-moral ?

 

Qu’à cela ne tienne, ce n'est pas tant le mensonge d’un homme qui m’interpelle le plus aujourd'hui, que je considère comme dévastateur. C’est cette schizophrénie que les français pourraient attribuer aux socialistes professant la vertu le jour et encourageant le vice la nuit.


En pleine entreprise de rétablissement des comptes publics, l'affaire Cahuzac fait mal. L'homme qui, au budget, était chargé de lever l'impôt avait cherché à y échapper ; celui qui devait amener les riches à plus de patriotisme fiscal aimait lui-même l'argent au point d'aller en dissimuler une partie à l'étranger. Gravissime écart entre la parole et les actes qui relève certes d'une faillite morale individuelle mais qui rejaillit violemment d’abord sur les socialistes et après sur toute une politique : compliqué, en effet, après ce séisme, de « réussir le redressement du pays dans la justice », comme le réclame sans cesse  le Premier Ministre.


François Hollande et son gouvernement ont beau protester de leur bonne foi, assurer qu'ils n'étaient au courant de rien, récuser l'utilisation d'officines de renseignement pour tout savoir de leurs ministres, le mal est fait : la gauche morale est grabataire, pis, elle est vaincue. Et sa défaite n'est pas seulement morale. Elle est aussi fonctionnelle. Les valeurs érigées en dogmes sont facilement violées pour peu que cela serve les intérêts de quelques uns, au grand mépris des choix des militants. 

 

Dans un courrier adressé aux militants, Harlem Désir dit comprendre «la stupeur et la colère» créées par l’affaire Cahuzac. L’argumentaire, même s’il peut réconforter certains esprits, me paraît court et ne semble ôter toute tentative de démobilisation à certains militants. On ne peut demander aux militants de retourner au charbon comme si de rien n’était sans repenser au fonctionnement du parti socialiste et à la valeur fondamentale de la parole militante. La crise de confiance qui se prolonge depuis l’onde de choc Cahuzac doit être féconde et pousser systématiquement le parti socialiste à revoir son rapport au pouvoir en place, mais aussi aux militants. Le PS doit muter et sortir de son conformisme sclérosant qui empêche tout renouvellement du personnel politique. Un peu partout en France,  depuis la victoire de Hollande, les réunions de sections socialistes sont vides parce qu’on y débat peu ou pas d’idées. Certains militants souhaitant être élus ou placés « gracieusement » sur liste aux échéances municipales  se transforment en larbins et valident, tel le chien de Pavlov, tous les avis du « calife » local qui tire profit de son statut d’apparatchik.

 

Comment débattre en toute sérénité avec ses camarades si l’on court le risque d’apparaître comme l’emmerdeur parce que certains militants ont préféré donner « leur langue au calife » en espérant un traitement bienveillant de sa part ?

 

J’ai la facilité de croire que  ce concours de lâcheté n’est pas négligeable dans la constitution du sentiment de toute puissance des gens comme Cahuzac, DSK, Guérini, etc…

 

Si ces derniers ont pu s’enivrer de cette puissance illusoire, qu’est-ce qui aurait pu les empêcher de mentir aux militants, pis à la France entière ?

 

Comparaison n’est pas raison. Mais mettons en parallèle le mensonge déshonorant de Cahuzac et l’engagement fait par nombre de députés socialistes élus en juin 2012 de démissionner de leurs mandats dans les exécutifs locaux avant le 30 septembre 2012. Avant l’éventuelle application du non-cumul en 2017 (l’enfer est pavé de bonnes intentions), combien de députés ont respecté cet engagement ? Ont-ils menti ? Ont-ils violé le vote des militants entérinant l’application en 2012 de la règle du non-cumul ?

 

Avant de jeter l’anathème sur Jérôme Cahuzac, les militants feraient mieux de reprendre le pouvoir au sein du parti socialiste, de libérer leur parole afin que les idées reprennent leur juste et noble place.

 

Enfin, quand on pense à Jaurès, Blum et à Mendès France, nul ne peut rendre sa carte d’adhérent et laisser les valeurs défendues par ces illustres personnages détournées par  n’importe quel calife local ou un Cahuzac en devenir…

 

PS : Ma saine colère ne peut m’empêcher d’apporter, en connaissance de cause, un soutien à Pierre Moscovici victime d’un grave procès d’intention. Maîtrisant bien les assistances administratives internationales en cas d’optimisation ou d’évasion fiscale et connaissant très bien les terme et champ d’application de la convention fiscale franco-suisse de 2009, je puis vous assurer que Moscovici a respecté la procédure d’entraide en posant les bonnes questions sur une période qu’on peut estimer large à la lecture des termes de ladite Convention.

 

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commentaires

L
Gaëtan Gorce a écrit sur son blog : "C'est la dérive clanique qui s'est emparée du Parti socialiste qui a conduit presque mécaniquement à cette situation. DSK pas plus que Cahuzac ne sont des<br /> accidents." Gaëtan Gorce est l'un des seuls élus à dénoncer publiquement le "sentiment d'impunité" des dirigeants socialistes, qui serait "la conséquence d'un processus d'oligarchisation de<br /> l'appareil dirigeant du parti". Hervé, tu vois toujours juste
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K
Bravo Hervé pour ton article.Je partage ton avis et j'y retrouve un peu les termes de nos échanges à Metz.
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  • : Le blog de Hervé-Mélaine AGBESSI
  • : "L'esprit né de la vérité a plus de puissance que la force des circonstances" Albert SCHWEITZER.
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  • Hervé-Mélaine AGBESSI
  • Docteur en droit public économique, diplômé de l'université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne). Expert en fiscalité internationale.
  • Docteur en droit public économique, diplômé de l'université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne). Expert en fiscalité internationale.

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