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20 mai 2008 2 20 /05 /mai /2008 13:45

La loi Waldeck-Rousseau de 1884 relative au financement des syndicats dispense  les organisations syndicales de rendre public leur compte et les protège de toute interférence judiciaire. Cette opacité originelle était censée protéger le salarié du patronat en garantissant la discrétion, la neutralité sinon le secret sur son appartenance ou non à telle ou telle centrale syndicale.

 

A partir du moment où le nombre exact des adhérents des syndicats est une inconnue (800.000 adhérents officiels à la CFDT pour 670.000 estimés, 800.000 officiels à FO pour 350.000 estimés, 132.000 officiels à  la CFTC pour 100.000 estimés, 710.000 officiels à la CGT contre une estimation de 600.000 environ, etc.…) leur mode de financement végète dans une  opacité éloquente. Plusieurs enquêtes parallèles ont abouti à un chiffre approximatif de 40 millions d'euros de subventions par an distribués par l'Etat aux principaux syndicats. Mais ce chiffre est empreint d’inexactitude puisque les centrales ne publient pas leur compte.

 

En clair, comme l’a mentionné un rapport de la Cour des comptes (rapport Hadas-Lebel), il règne « une grande opacité » sur le mode de financement des syndicats.

 

Suite au scandale de l’IUMM, François Chérèque, le N° 1 de la CFDT, a été contraint d'en dire plus. Dans les médias, il a déclaré que la CDFT était financé à hauteur de 30% par des fonds publics sur un montant total de plus de 40 millions d'euros de budget annuel.

 

Outre les subventions publiques, les syndicats diversifient leur mode de financement externe, parfois à la limite de la légalité. Le livre « L’argent noir des syndicalistes » publié aux éditions Fayard met en lumière les techniques utilisées pour corrompre les représentants des salariés. Rémunérations occultes, gros chèques, cadeaux, détournement de l’argent de la formation professionnelle, mise à disposition de véhicule de fonction, double salaire,  horaires allégés, licenciements à prix exorbitant, financement des syndicats sur les fonds des caisses de retraites….voilà la liste non exhaustive des griefs reprochés aux syndicats.

 

De son côté, la cour des comptes dénonce également la logique de détachements des fonctionnaires au service des syndicats. La plupart des permanents des organisations syndicales ne sont pas payés directement par le syndicat. Ils sont détachés de leur corps d'origine, au titre de la participation à l'administration de leurs syndicats. Ainsi, tel salarié d'une entreprise publique, bénéficie d'une décharge horaire pour ses activités syndicales. Pour certains, la décharge horaire est l'équivalent d'un temps plein. D'un point de vue juridique, on se retrouve alors dans une situation d'emplois fictifs : une administration rémunère un salarié qui travaille à temps plein dans un syndicat et non dans l'administration en question. Pour l'heure, le pouvoir législatif n'a toujours pas légiféré pour clarifier la situation juridique de ces salariés en détachement.

 

Le scandale financier mis à jour par l’affaire de l’IUMM doit relancer la question du financement des syndicats. Quand Denis-Gautier Sauvagnac, ex N°1 de l’UIMM, justifie les retraits de 19 millions d’euros d’argent liquide par le souci de « fluidifier le dialogue social », tout porte à croire que cet argent aurait servi à acheter la paix sociale, c’est-à-dire à corrompre certaines personnes, parties prenantes à certaines négociations collectives, au mépris des règles élémentaires de la défense des intérêts des salariés.

 

Même si jusqu’à présent, Denis-Gautier Sauvagnac n’a jamais mentionné une organisation syndicale comme destinataire des sommes retirées, il n’en demeure pas moins que ce scandale financier jette un lourd discrédit sur la probité, le sérieux et la confiance des syndicats.

 

Face à la faiblesse du nombre d'adhérents, la question du réel financement des syndicats est posée. Les syndicats français ont besoin de transparence et de clarté. La loi de 1884 sur le financement des syndicats est inadaptée et doit être corrigée dans un sens encourageant des modes nouveaux, pluriels et transparents de financement. De même, il semble opportun, pour des raisons d’efficacité, de structure et d’économie, que la fusion de certains syndicats (si ce n’est déjà annoncé pour la CGC et l’UNSA) soit effective. C’est le moyen immédiat de faire des économies d’effectif, de mutualiser les moyens de lutte, de créer de nouvelles synergies et de façonner un syndicalisme réformiste et exigeant inhérent aux bouleversements nouveaux occasionnés par la mondialisation financière. Peut-être après cette grande recomposition, comme dans les pays scandinaves ou en Allemagne, les salariés retrouveront la nécessité naturelle de prendre la carte d’une organisation syndicale. Pour la pleine légitimité des réformes et des négociations collectives défendues par...les syndicats.

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commentaires

J
Vous avez raison, les syndicats doivent être transparents financièrement sinon ils seront toujours suspects. Nous avons besoin des syndicats forts et irréprochables. Je partage l'idée des fusions et pourquoi celle d'une adhésion obligatoire des salariés.Bien avant tout cela, il faudra mettre de l'ordre dans les centrales. J'étais adhérent à la CFTC et je sais de quoi je parle.
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  • : "L'esprit né de la vérité a plus de puissance que la force des circonstances" Albert SCHWEITZER.
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  • Hervé-Mélaine AGBESSI
  • Docteur en droit public économique, diplômé de l'université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne). Expert en fiscalité internationale.
  • Docteur en droit public économique, diplômé de l'université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne). Expert en fiscalité internationale.

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